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Bras de fer avec le changement climatique

±ĘłÜ˛ú±ôľ±Ă©: 14 March 2012

Selon une recherche de McGill et Concordia, le fer est essentielĚý
pour inverser le réchauffement climatique

Le Canada se dĂ©finit comme une nation qui s’étend d’un ocĂ©an Ă  l’autre, ocĂ©an Arctique compris. Mais peut-il prĂ©server ses cĂ´tes du changement climatique? Yves GĂ©linas, professeur agrĂ©gĂ© au DĂ©partement de chimie et de biochimie de l’UniversitĂ© Concordia, a trouvĂ© la solution dans un Ă©lĂ©ment pour le moins surprenantĚý: le fer.

Dans une étude publiée dans Nature en collaboration avec Karine Lalonde et Alexandre Ouellet, respectivement doctorante et diplômé d’un doctorat à Concordia, ainsi que son confrère Alfonso Mucci de l’Université McGill, le professeur Gélinas examine la constitution chimique d’échantillons de sédiments provenant des différents océans de la planète pour montrer comment les oxydes de fer extraient le dioxyde de carbone présent dans l’air.

«ĚýPartout dans le monde, on se bat pour rĂ©duire les Ă©missions de CO2 dans l’atmosphère afin de freiner le changement climatique. Mais lorsqu’il est question de se dĂ©barrasser du CO2 dĂ©jĂ  prĂ©sent, la nature joue un rĂ´le importantĚý», explique le professeur GĂ©linas. En effet, le CO2 est extrait de l’atmosphère et piĂ©gĂ© en toute sĂ©curitĂ© sur le plancher ocĂ©anique au terme d’une rĂ©action naturelle qui fixe la molĂ©cule au carbone organique, Ă  la surface des grandes Ă©tendues d’eau.

Comment ce processus de fixation se produit-il exactement? «ĚýPendant plus de dixĚýans, la communautĂ© scientifique a retenu l’hypothèse selon laquelle de petits minĂ©raux argileux Ă©taient chargĂ©s de prĂ©server cette fraction prĂ©cise du carbone organique une fois qu’il avait atteint le plancher ocĂ©aniqueĚý», poursuit le professeur Mucci, dont les recherches sur le mĂŞme thème ont Ă©tĂ© reconnues parmi les «Ěý10ĚýdĂ©couvertes de l’annĂ©eĚý» par le magazine QuĂ©bec Science. Ă€ l’issue d’une analyse minutieuse des sĂ©diments provenant des quatre coins du monde, Yves GĂ©linas et son Ă©quipe ont dĂ©couvert que ce sont en fait les oxydes de fer qui captent un cinquième de l’ensemble du carbone organique dĂ©posĂ© sur le plancher ocĂ©anique.

Mais cette dĂ©couverte soulève son lot d’inquiĂ©tudes, car les oxydes de fer font de plus en plus figure de molĂ©cules menacĂ©es. Comme leur nom le suggère, les oxydes de fer ne se forment qu’en prĂ©sence d’oxygène. Autrement dit, il faut un Ă©cosystème cĂ´tier bien oxygĂ©nĂ© pour qu’ils accomplissent leur mission et contribuent Ă  l’extraction du dioxyde de carbone prĂ©sent dans l’atmosphère. Or, on a observĂ© une diminution inquiĂ©tante des concentrations d’oxygène dissous dans certains environnements cĂ´tiers – et cette tendance ne cesse de s’accentuer. Des lieux autrefois fourmillants de vie se transforment lentement en «Ěýzones mortesĚý», oĂą l’oxygène dans les sĂ©diments de surface ne cesse de se rarĂ©fier. Et la faute est bien sĂ»r attribuable Ă  la pollution anthropique.

Les principaux cours d’eau déversent régulièrement des polluants issus des engrais agricoles et des déchets humains directement dans les lacs et environnements côtiers, engendrant une surabondance de plancton. Ces organismes vivants sont détruits à un rythme de plus en plus important et la quantité de carbone organique qui tombe dans les profondeurs aquatiques ne cesse d’augmenter, entraînant une consommation accrue d’oxygène dissous. Cela a pour effet d’exacerber le problème des faibles niveaux d’oxygène dissous. Si la quantité d’oxygène dans un environnement aquatique passe en deçà d’un certain niveau, la production d’oxyde de fer est interrompue, ce qui ampute l’environnement d’une bonne partie de sa faculté naturelle à extraire le dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère.

Mais tout espoir n’est pas pour autant perdu. «ĚýCette Ă©tude se prĂ©sente aussi comme un plaidoyer indirect en faveur de la rĂ©duction des quantitĂ©s d’engrais et autres contaminants riches en nutriments dĂ©versĂ©s dans les systèmes aquatiquesĚý», conclut Karine Lalonde, Ă  qui le professeur GĂ©linas crĂ©dite de la majeure partie des travaux rĂ©alisĂ©s pour cette recherche fondamentale. La doctorante espère qu’une meilleure connaissance du mĂ©canisme de stabilisation fer-carbone organique pourra «Ěýun jour dĂ©boucher sur de nouvelles façons d’augmenter la vitesse d’enfouissement du carbone organique dans les sĂ©dimentsĚý».

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