Octroi d’une subvention de 35 millions USD à la recherche sur les troubles du sommeil liés à la neurodégénérescence
Une équipe internationale à la découverte des signes occultes de lésions cérébrales dans les troubles du comportement au cours du sommeil paradoxal
Les personnes présentant un trouble du comportement en sommeil paradoxal vivent physiquement leurs rêves. Il leur arrive de lever le bras pour attraper une balle imaginaire ou de tenter d’échapper à un assaillant inexistant, alors qu’elles dorment tranquillement dans leur lit. De telles actions dépassent le simple désagrément. En effet, dans les dix années suivant un tel diagnostic, les individus atteints de ce trouble ont entre 50 à 80 % de risques de présenter une maladie neurodégénérative grave.
Une équipe internationale dirigée par des chercheurs du Neuro (Institut neurologique de Montréal) de l’Université McGill, de la Washington University School of Medicine à Saint-Louis et de la Clinique Mayo à Rochester au Minnesota a reçu une subvention de 35,1 millions de dollars USD pour mettre au point des biomarqueurs afin d’identifier les personnes atteintes du trouble du sommeil qui développeront des maladies neurodégénératives, de préciser le type de maladie en question, le moment de survenue des symptômes ainsi que leur vitesse d’évolution. L’objectif de cette subvention, accordée par le National Institute of Aging (NIA) et le National Institute of Neurological Disorders and Stroke (NINDS), relevant tous deux des Instituts nationaux de la santé (NIH) des États-Unis, est de jeter les bases qui serviront à d’autres essais cliniques en vue d’éviter qu’une affection gênante évolue en maladie invalidante.
Le trouble du comportement en sommeil paradoxal est associé à la maladie de Parkinson qui est un trouble du mouvement, à la démence à corps de Lewy qui entraîne une dégradation des capacités cognitives, et à l’atrophie multisystématisée qui se caractérise par l’incapacité à réguler les processus involontaires, comme la tension artérielle, la respiration et les fonctions urinaires et intestinales.
« Cette recherche vise avant tout à trouver des moyens de détecter de manière fiable et au stade précoce, une maladie de Parkinson, une démence à corps de Lewy et une atrophie multisystématisée » selon le Dr Ronald Postuma, cochercheur principal au Neuro et à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill. « Lorsque nous y parviendrons, nous pourrons alors commencer à lancer des essais afin de prévenir la maladie. Jusqu’à présent, nous disposons de très bons prédicteurs cliniques de la maladie, mais la recherche sur les biomarqueurs doit s’accélérer. L’importance des biomarqueurs réside dans le fait qu’ils permettent de détecter précisément à quel stade de la maladie se situe un patient, en vue de proposer des traitements mieux ciblés. »
« La probabilité que les personnes atteintes d’un trouble du comportement en sommeil paradoxal développent une maladie neurodégénérative s’avère assez alarmante, et il n’existe actuellement aucun traitement pour diminuer un tel risque », a déclaré la cochercheuse principale, la Dre Yo-El Ju, neurologiste à l’Université de Washington. « Nous n’avons aucun moyen de prédire si une personne développera l’une de ces pathologies et, si tel est le cas, laquelle et dans quel délai. Et nous n’avons certainement aucun moyen de la prévenir. »
Normalement, pendant le sommeil paradoxal – la phase du sommeil pendant laquelle surviennent les rêves – les individus sont paralysés. Le fait d’agir pendant le rêve constitue le signe précoce que quelque chose dans le cerveau ne fonctionne pas comme il le devrait. Le trouble du comportement en sommeil paradoxal est associé à des maladies provoquées par l’accumulation d’amas anormaux d’une protéine, l’alpha-synucléine, dans le cerveau. En phase précoce de ces maladies, ces amas entrent souvent en coalescence dans la portion du cerveau qui paralyse le corps pendant le sommeil paradoxal. Lorsque cette zone est lésée, les personnes commencent à s’agiter dans leurs rêves.
La mise au point de plusieurs médicaments et immunothérapies ciblant la synucléine se poursuit et ceux-ci seront probablement prêts pour les essais cliniques sur le trouble du comportement en sommeil paradoxal. Avant cela, les scientifiques doivent produire un ensemble de résultats sur des tests spécialisés, ou biomarqueurs, d’une maladie neurologique imminente chez les personnes atteintes d’un tel trouble.
« Les informations servant à prédire le moment de survenue du trouble lié à la synucléinopathie et son type se trouvent presque certainement dans un ou plusieurs des biomarqueurs qui seront évalués lors de cette étude », explique le Dr Bradley Boeve, neurologue à la Clinique Mayo et cochercheur principal pour la subvention. « Si nous parvenons à détecter les biomarqueurs qui augurent de l’avenir, nous pourrons alors nous concentrer sur ces derniers au cours des prochains essais cliniques en vue de retarder l’apparition de la démence ou du parkinsonisme ou les prévenir. »
Le Consortium NAPS
En 2018, le Dr Boeve, professeur de démence à corps de Lewy à la Clinique Mayo (Little Family Foundation) et la Dre Ju, titulaire de la chaire de neurologie Barbara Burton et Reuben Morriss III à l’Université de Washington ont fondé le North American Prodromal Synucleinopathy (NAPS) Consortium pour réunir une cohorte de personnes atteintes du trouble du comportement en sommeil paradoxal afin de mettre au point des outils standardisés pour les étudier. Plus de 350 personnes atteintes d’un tel trouble ont été incluses par le Consortium NAPS. Cette nouvelle subvention assure le financement d’une étude plus vaste visant à trouver des biomarqueurs chez ces individus ainsi que chez de nouveaux participants.
Intitulée NAPS2, cette vaste étude est dirigée par les docteurs Ju, Boeve et Postuma. ³¢â€™Ã©t³Ü»å±ð fera le suivi pendant cinq ans d’environ 430 participants atteints du trouble du comportement en sommeil paradoxal – ainsi que de 60 personnes sans aucun trouble du sommeil. Les patients et le groupe témoin de participants passeront régulièrement des examens cliniques complets et feront l’objet d’études du sommeil nocturne. Ils fourniront des échantillons de sang et, s’ils le veulent, de liquide céphalo-rachidien. Les participants souffrant de troubles du comportement en sommeil paradoxal passeront également des scintigraphies cérébrales.
« NAPS2 est un autre exemple du soutien coordonné et collaboratif fourni par le NIH pour favoriser les découvertes et la connaissance de troubles cérébraux dévastateurs », fait remarquer Mack Mackiewicz, Ph. D., directeur de programme dans la division des neurosciences du NIA et scientifique de projet du NIA pour cette subvention. « Ce projet, qui analyse le sommeil comme un facteur de risque de démence, constitue un exemple parmi tant d’autres des recherches financées par le NIH sur les maladies neurodégénératives. » Le NIA et le NINDS financent à parts égales l’étude NAPS2, en apportant une contribution scientifique conjointe alors que le NIA assure la supervision du projet.
Les troubles à corps de Lewy
Plus de 2 millions de personnes aux États-Unis vivent avec des troubles à corps de Lewy, un groupe de maladies causées par des amas d’alpha-synucléine dans le cerveau. Ces troubles, désignés sous le terme de synucléinopathie, comprennent la démence à corps de Lewy, la maladie de Parkinson et l’atrophie multisystématisée. Prises ensemble, ils représentent la deuxième cause en ordre de fréquence de maladies neurodégénératives après la maladie d’Alzheimer. Cette dernière et les synucléinopathie présentent plusieurs similitudes. Dans les deux cas, des amas anormaux de protéines s’accumulent dans le cerveau pendant des années avant l’apparition des symptômes : bêta-amyloïde et tau dans la maladie d’Alzheimer, synucléine dans les troubles à corps de Lewy. Environ la moitié des personnes présentant des amas d’amyloïde et de tau associés à la maladie d’Alzheimer ont également des amas de synucléines, raison pour laquelle les synucléinopathie font partie des démences liées à la maladie d’Alzheimer. En outre, dans ces deux types de pathologies, les symptômes comme les altérations de la pensée et du comportement surviennent tôt dans le processus de la maladie.
Les personnes atteintes de troubles à corps de Lewy ne présentent pas toutes des troubles du mouvement dans le sommeil avant l’apparition des symptômes neurologiques. Néanmoins, l’étude des personnes atteintes du trouble du comportement en sommeil paradoxal, aux premiers stades d’un processus neurodégénératif, permettrait de connaitre les modalités selon lesquelles des amas anormaux de protéines entraînent des lésions cérébrales, sous quelles formes se manifestent les différents symptômes et quelle est la démarche pour arrêter ou ralentir le processus neurodégénératif.
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Neuf centres cliniques participent à l’étude :
Cette étude a reçu le soutien du National Institute on Aging et du National Institute of Neurological Disorders and Stroke, tous deux relevant des National Institutes of Health (NIH) sous le numéro de bourse U19AG071754. Ce financement représente 100 % du coût total du programme. Le contenu de cet article relève de la seule responsabilité des auteurs et ne représente pas nécessairement le point de vue officiel du National Institutes of Health.
Le Neuro
L’Institut-hôpital neurologique de Montréal – Le Neuro – est une destination de renommée mondiale en recherche sur le cerveau et en soins neurologiques de pointe. Depuis sa fondation en 1934 par le célèbre neurochirurgien Dr Wilder Penfield, Le Neuro est devenu le plus grand centre clinique et de recherche spécialisé en neurosciences au Canada, et l’un des plus grands au monde. L’intégration harmonieuse de la recherche, des soins aux patients et de la formation des plus grands spécialistes du monde contribue à faire du Neuro un centre d’excellence unique pour l’avancement des connaissances sur les troubles du système nerveux et leur traitement. En 2016, Le Neuro est devenu le premier institut au monde à adopter pleinement la philosophie de la science ouverte, en créant l’Institut de science ouverte Tanenbaum. L’Institut neurologique de Montréal est un institut de recherche et d’enseignement de l’Université McGill. L’Hôpital neurologique de Montréal s’inscrit dans la mission en neurosciences du Centre universitaire de santé McGill. Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter le site
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