À la suite de la publication de rapports troublants sur la situation dans les établissements de soins de longue durée au Québec et en Ontario, McGill dans la ville s’est entretenu avec trois expertes mcgilloises de l’École de travail social : les professeures agrégées Shari Brotman et Tamara Sussman, et la doctorante Susan Mintzberg.
Dans ce dialogue, les trois expertes nous parlent de divers aspects de la prise en charge des personnes âgées au Québec, et notamment de la situation actuelle et des améliorations à apporter.
Quelles répercussions la pandémie a-t-elle sur la santé physique et psychologique des personnes âgées, tout particulièrement de celles qui se trouvent dans des établissements de soins de longue durée?
La santĂ© des personnes âgĂ©es est au cĹ“ur de cette pandĂ©mie. Les Canadiens sont bouleversĂ©s d’entendre parler chaque jour de la crise qui persiste dans les Ă©tablissements de soins de longue durĂ©e. Toutefois, ce ne sont que 4 % des ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő qui rĂ©sident dans des Ă©tablissements de ce genre; la plupart des personnes âgĂ©es doivent se dĂ©brouiller seules, loin de l’attention des mĂ©dias.
La COVID-19 afflige les personnes âgées de bien des façons, que ces dernières vivent dans des établissements de soins de longue durée, dans des maisons de retraite ou dans leur propre maison. Dans bien des cas, ces personnes ne peuvent plus compter sur des services professionnels, qui ont été supprimés ou réduits, ni sur l’aide de parents, d’amis et de soignants à domicile. Leur bien-être général, tant physique que psychologique, s’en trouve alors fragilisé.
Il faut aussi dire que nous avons très peu parlé des personnes âgées qui sont elles-mêmes des aidants, des bénévoles et des soignants de première ligne. Certaines d’entre elles vont même jusqu’à sortir de la retraite pour prêter main-forte. Il y a aussi celles qui prennent soin d’un conjoint ou d’un parent depuis des années, et celles qui sont soudainement devenues de proches aidants à cause de la COVID-19, souvent avec très peu ou pas du tout d’aide extérieure.
Cette pandémie a mis au jour des lacunes qui durent depuis beaucoup trop longtemps dans la prise en charge de nos concitoyens âgés, et c’est probablement ce que cette crise nous aura révélé de plus important sur la réalité des personnes âgées.
Les proches aidants se sont vu refuser l’accès aux maisons de retraite du Québec. Quelles en sont les conséquences, et quelles lacunes ces personnes comblent-elles dans le système de santé?
Il fallait absolument que les proches aidants soient autorisés à revenir. Au début de la pandémie, on les a exclus des établissements de soins de longue durée, parce qu’on a estimé qu’il fallait garder les visiteurs à l’écart pour limiter les risques. Mais ils sont tellement plus que ça. Les proches aidants sont les soignants de première ligne invisibles de notre système de santé. Lorsque nous avons retiré ces personnes au début de la pandémie, le navire a commencé à couler.
Notre gouvernement doit se rendre à l’évidence : les familles jouent un rôle crucial. Souvent, elles prodiguent des soins personnalisés que notre système n’est pas en mesure d’offrir, notamment un soutien linguistique, culturel et de santé mentale. Elles connaissent les besoins de base de leurs proches, qui sont parfois plus enclins à accepter l’aide de membres de leur famille. Malheureusement, partout au pays, bon nombre de proches aidants se heurtent toujours à des obstacles qui les empêchent de fournir des soins essentiels dans les maisons de retraite.
Qu’en est-il des proches aidants qui sont eux-mêmes des personnes âgées? Ont-ils le droit de prendre soin de leur conjoint? Prend-on des précautions supplémentaires pour les protéger?
Non seulement les proches aidants âgés sont autorisés à prendre soin d’un conjoint ou d’autres proches, mais bon nombre d’entre eux sont obligés de le faire puisque beaucoup de services à domicile ont été restreints ou annulés à cause de la COVID-19.
De plus, comme les proches aidants ne sont pas reconnus comme des travailleurs essentiels, on ne leur fournit toujours pas d’équipement de protection individuelle. Ils doivent se procurer eux-mêmes une protection de base, comme des masques, ou s’en passer. Ils deviennent alors plus vulnérables, surtout si la personne dont ils prennent soin a reçu un diagnostic de COVID-19 ou présente des symptômes de la maladie.
Pour couronner le tout, malgré l’intensification du dépistage par le gouvernement, bon nombre de proches aidants n’ont toujours pas accès aux tests, ce qui ne fait qu’augmenter les risques pour eux et pour les personnes qu’ils côtoient.
Nous avons tous entendu parler de cas bouleversants de personnes âgĂ©es qui dĂ©pĂ©rissaient parce qu’elles n’avaient pas eu accès Ă leurs proches aidants pendant les deux premiers mois de la pandĂ©mie. Quelles rĂ©percussions une longue pĂ©riode de stress et d’anxiĂ©tĂ© peut-elle avoir sur les ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő et leurs familles?
Les médias nous ont beaucoup parlé des effets dévastateurs que cette situation a eus sur un très grand nombre de Canadiens. Nous entendons souvent que la santé de personnes âgées se dégrade rapidement en l’espace de quelques semaines, voire de quelques jours, en l’absence de la famille. Des tests ont d’ailleurs révélé que beaucoup de décès n’étaient pas attribuables à la COVID-19.
C’est une période stressante pour tout le monde, et il faut pouvoir trouver du réconfort auprès de ceux qui nous sont chers. Tout le monde souffre de voir les nombreuses personnes âgées vulnérables séparées de leur famille, et parfois coupées de toute communication, et les dommages, immenses, sont souvent irréversibles.
La santé mentale et la santé physique sont indissociables. Il n’est donc pas surprenant qu’en se retrouvant seules, parfois désorientées, effrayées et envahies par un sentiment d’abandon, des personnes âgées soient en proie au stress, à l’anxiété et à la dépression. Au fur et à mesure que leur santé mentale se détériore, il en est de même pour leur santé physique. Bon nombre de ces personnes meurent de chagrin, alors que leur famille, incapable de les rassurer, souffrira longtemps de n’avoir pas pu être là dans un moment aussi important.
La pandémie de COVID-19 a touché les Canadiens de multiples façons, et nos gouvernements ainsi que notre système de santé doivent se préparer à gérer l’épidémie de problèmes de santé mentale qui s’ensuivra inévitablement.
Qu’a révélé la pandémie de COVID-19 au sujet des établissements de soins de longue durée au Québec et de la façon dont nos personnes âgées sont prises en charge? La situation actuelle a‑t‑elle été causée par la pandémie ou existe-t-elle depuis longtemps?
Les Forces armées canadiennes ont déposé un rapport cinglant sur les conditions que les soldats ont constatées à leur arrivée dans les établissements de soins de longue durée au Québec et en Ontario. Le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, s’est montré surpris et a imputé la faute au gouvernement précédent, tandis que le premier ministre du Québec, François Legault, a dit être au courant de ces problèmes, qui durent depuis longtemps et qu’il attribue à la pénurie de travailleurs. Les deux réactions sont inquiétantes : il aura fallu une pandémie et un rapport des Forces armées pour que nos gouvernements provinciaux admettent qu’il y a des problèmes dans ces établissements et prennent des mesures pour les régler.
La situation est d’autant plus troublante que les travailleurs de première ligne agitent le drapeau rouge depuis des dĂ©cennies. Les soins aux ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő sont sous-financĂ©s et manquent de soutien essentiel. Loin des yeux, loin du cĹ“ur. Personnel sous-payĂ©, pĂ©nurie de travailleurs, formation inadĂ©quate, qualitĂ© de vie inacceptable, aires communes inadaptĂ©es, nourriture insipide, conditions de travail difficiles : la liste est longue. Les personnes qui travaillent sur le terrain ont essayĂ© de faire connaĂ®tre cette rĂ©alitĂ©, mais les dirigeants ont choisi de ne pas les Ă©couter. Aujourd’hui, nous payons chèrement une gestion descendante aveugle Ă une situation si Ă©vidente, depuis si longtemps.
Qui plus est, ce problème ne se limite pas aux soins de longue durée. Les services aux personnes âgées dans tous les secteurs des soins de santé et des services sociaux – pensons aux soins à domicile, au transport et aux programmes communautaires – ont été négligés et sous-financés pendant des décennies. Inévitablement, les services sont devenus de plus en plus inaccessibles et inéquitables, particulièrement pour les personnes âgées marginalisées, immigrantes ou autochtones, par exemple.
Quels changements doit-on apporter pour corriger la situation à long terme? Parlons-nous ici d’une réforme complète du système?
MalgrĂ© les lacunes, nul besoin de rĂ©inventer la roue. Nous pouvons dĂ©jĂ compter sur un grand nombre de personnes fiables, bienveillantes et dĂ©vouĂ©es qui travaillent auprès des ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő. Dans le cadre de nos recherches en travail social, nous entretenons des liens Ă©troits avec des personnes qui vivent et travaillent dans ces milieux et nous avons parfaitement conscience des prĂ©cieuses ressources dont nous disposons.
Si nous écoutions davantage nos travailleurs de première ligne, les proches aidants et, surtout, les personnes âgées elles-mêmes, nous pourrions réellement changer les choses en fonction des besoins des personnes et des communautés concernées. Nous pourrions mettre en place des politiques et des programmes mieux adaptés aux diverses réalités que vivent les personnes âgées.
Tout d’abord, il faut valoriser le travail de ceux et celles qui passent leurs journĂ©es Ă prendre soin des personnes âgĂ©es et mieux le rĂ©munĂ©rer. On pense notamment aux prĂ©posĂ©s aux bĂ©nĂ©ficiaires, aux aides en diĂ©tĂ©tique, aux techniciens en loisirs, au personnel d’entretien et aux proches aidants. Ces personnes travaillent fort et assurent 80 % des soins; pourtant, elles sont souvent invisibles. Ensuite, nous devons reconnaĂ®tre que les proches aidants ne sont pas de simples visiteurs, mais plutĂ´t des travailleurs essentiels qui prodiguent des soins aux ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő. Il faut reconnaĂ®tre leur travail, les soutenir et les valoriser, mais pas seulement d’un point de vue psychosocial : il faut les encourager et leur donner les moyens d’aider leurs proches.
Au moment de prendre des décisions et d’élaborer des politiques, il faut absolument tenir compte de l’opinion de toutes ces personnes. Si nous n’écoutons pas ceux et celles qui travaillent sur le terrain, comment pourrons-nous savoir ce qu’il faut faire pour redresser la situation? Et, surtout, nous devrons garder cette crise à l’esprit et rappeler à nos gouvernements, même longtemps après la pandémie, qu’ils se sont engagés à apporter des changements.
Dans certaines cultures, on tient les ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő en haute estime et on prend soin d’eux. Dans bien des cas, ils habitent avec leurs enfants. A-t-on raison de dire que ce n’est pas le cas pour beaucoup de personnes âgĂ©es en AmĂ©rique du Nord? Pourquoi?
On croit souvent que les minorités ethnoculturelles sont plus susceptibles de refuser les services institutionnels et de décider de prendre soin des leurs à domicile. Il s’agit pourtant d’un stéréotype qui prend racine dans une mauvaise connaissance des facteurs qui motivent les choix de ces communautés, et il en découle des services inadéquats. Par exemple, les fournisseurs de services présument souvent que les familles issues de minorités ethnoculturelles préfèrent prendre leurs proches en charge; ils ne cherchent pas à comprendre les circonstances sociales qui incitent les familles à prendre cette décision.
C’est souvent la mĂ©fiance, ou encore la discrimination vĂ©cue au sein de la sociĂ©tĂ© et du système de santĂ©, plutĂ´t que les valeurs culturelles qui motivent les dĂ©cisions de ces familles en matière de soins. Les exemples ne manquent pas : absence d’interprètes linguistiques et culturels dans les Ă©tablissements pour personnes âgĂ©es, forte tendance Ă s’en remettre aux membres de la famille pour la transmission de l’information au lieu de communiquer directement avec le bĂ©nĂ©ficiaire, offre alimentaire pauvre, non-reconnaissance de la diversitĂ© en matière de croyances religieuses, manque de considĂ©ration pour la sĂ©curitĂ© culturelle des ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő autochtones et absence totale de rĂ©seautage avec les organismes reprĂ©sentant les minoritĂ©s ethnoculturelles, les communautĂ©s LGBTQ, les immigrants et les autochtones, qui pourraient faire des recommandations en matière d’équitĂ©, de diversitĂ© et d’inclusion.
Tous les groupes culturels veulent prendre soin de leurs ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő, et ils doivent pouvoir compter sur un soutien appropriĂ© pour ĂŞtre en mesure d’assurer leur bien-ĂŞtre. Comme sociĂ©tĂ©, nous devons offrir des soins Ă©quitables pour tous.
La situation actuelle est extrêmement stressante pour beaucoup de personnes âgées. En notre qualité d’aidants, quel soutien émotionnel pouvons-nous leur offrir?
Pendant cette pandĂ©mie, nous logeons tous Ă la mĂŞme enseigne et nous Ă©prouvons tous des sentiments de peur, d’anxiĂ©tĂ© et de solitude. Nous avons tous besoin d’être rassurĂ©s, et c’est particulièrement le cas des personnes âgĂ©es, souvent plus isolĂ©es. Nous sommes nombreux, y compris les ˛ąĂ®˛ÔĂ©˛ő, Ă utiliser la technologie pour rester en contact avec la famille et les amis. Avec les personnes qui n’ont pas accès Ă ces outils, on a recours Ă d’autres mĂ©thodes : visites sur le pas de la porte, messages, appels tĂ©lĂ©phoniques.
Nous avons tous entendu de belles histoires à propos de proches aidants qui ont redoublé d’ingéniosité pour communiquer avec les leurs. Parfois, il suffit de peu de choses pour redonner le sourire à une personne. En faisant simplement savoir à une personne âgée qu’on pense à elle et qu’elle n’est pas seule, on peut réellement agir sur sa santé mentale et son bien-être.
Dans le contexte de la COVID-19, est-ce important de parler de la mort et des soins de fin de vie avec les personnes âgées?
Il n’est jamais facile de parler de la mort et des soins de fin de vie, même dans les meilleures circonstances possible. Malheureusement, ce sujet est encore tabou et bon nombre de familles, de personnes âgées et même de professionnels de la santé préfèrent l’éviter. Pourtant, il faut ouvrir le dialogue afin de pouvoir offrir des soins qui correspondent aux désirs et aux croyances de chacun.
C’est particulièrement important dans le contexte de la pandémie de COVID-19 puisque les proches aidants pourraient ne pas être présents en fin de vie et que les décisions médicales – sur le recours à un respirateur ou à d’autres mesures exceptionnelles – doivent être prises rapidement. Pour les infirmières et d’autres membres du personnel, qui aident maintenant les familles à être présentes virtuellement, savoir ce qui réconforte une personne, comme une musique en particulier ou un massage des pieds, peut les aider à bien accompagner une personne âgée et sa famille en fin de vie.
Il n’est pas facile d’aborder ces sujets, mais les familles auront ensuite l’esprit tranquille, sachant qu’elles pourront prendre des décisions éclairées et faire des suggestions pour garantir le confort de leur être cher le temps venu. Les familles peuvent se tourner vers différents outils qui les aideront à amorcer le dialogue; c’est notamment le cas de l’ et de .
En raison des restrictions imposées dans les salons funéraires et les lieux de sépulture, les familles doivent faire leur deuil dans des circonstances bien particulières. À long terme, quelles seront les répercussions sur les relations familiales?
Il faut surtout parler des répercussions que les règles de distanciation physique et les restrictions concernant les rassemblements auront sur le processus de deuil pour les familles qui ont perdu un proche pendant la pandémie. Toutes les cultures possèdent des rituels funéraires qui apportent réconfort et soutien aux personnes endeuillées. Cette épreuve est d’autant plus difficile que les contacts directs avec la famille et les amis sont interdits. Des gens ont trouvé de nouvelles façons de se rassembler, comme la shiva sur Zoom dans certaines communautés juives, mais rien ne peut remplacer la compassion transmise par un contact humain direct. Malheureusement, dans les circonstances actuelles, beaucoup de gens doivent faire leur deuil individuellement en attendant de pouvoir se réunir.
Pour nombre de familles, n’avoir pas pu être là aux derniers instants de la vie de leur proche rend la situation encore plus difficile et le deuil, encore plus lourd. Et il y aura des conséquences à long terme. Il faut maintenant s’en remettre aux soignants de première ligne, qui prodigueront des soins de confort pendant les derniers jours de la vie d’une personne et qui transmettront à la famille des détails sur ses derniers instants, en espérant faciliter le deuil.
Finalement, maintenant que la capacité de dépistage est plus grande, le gouvernement et le système de santé doivent absolument faire en sorte que les personnes qui ne présentent aucun symptôme, mais qui ont été en contact avec une personne atteinte de la COVID-19, aient facilement accès aux tests. Ainsi, les familles endeuillées sauront si elles peuvent se rassembler en toute sécurité pour se soutenir durant cette période difficile.
Susan Mintzberg est doctorante à l’École de travail social de l’Université McGill. Ses recherches portent sur le rôle des proches aidants dans les soins de santé mentale, et particulièrement sur la collaboration entre les membres des familles et les fournisseurs de services. Ses travaux prennent leur source dans dix années de pratique auprès de personnes et de familles dans le système de santé mentale communautaire.
Tamara Sussman est professeure agrégée à l’École de travail social de l’Université McGill. Forte de plus de dix années d’expérience auprès d’adultes et de familles aux prises avec des problèmes de santé mentale en milieux hospitaliers et communautaires, la Pre Sussman axe ses recherches sur l’incidence des services et systèmes de santé sur les personnes âgées et les membres de leur famille.
Shari Brotman est professeure agrégée à l’École de travail social de l’Université McGill. À titre d’éducatrice, de chercheuse et de praticienne, la Pre Brotman a beaucoup travaillé en gérontologie et en pratique anti-oppression en travail social. Ses travaux portent principalement sur l’accès et l’équité dans la conception et la prestation de soins de santé et de services sociaux destinés aux personnes âgées appartenant à des populations marginalisées (LGBTQ et immigrants), ainsi que sur les soignants qui prennent ces personnes en charge.
En photo: Susan Mintzberg, Tamara Sussman et Shari Brotman de l’École de travail social de l’Université McGill