La peur peut certes contribuer pour beaucoup à l’extinction d’une espèce animale, mais son absence peut se révéler tout aussi néfaste. Le Dronte de Maurice, le loup des Falkland et la rhytine de Steller sont toutes des espèces désormais éteintes, leur confiance envers l’Homme ayant causé leur perte.
Kyle Elliott, professeur adjoint au Département des ressources des sciences naturelles à l’Université McGill, et ses collègues de l’Université de Guelph ont mené une seconde étude, cette fois sur l’évolution de l’intrépidité chez la drosophile (communément appelée « mouche à fruits »). Il s’agit là d’un caractère important pour la conservation d’une espèce, l’animal intrépide étant particulièrement vulnérable aux prédateurs.
Les chercheurs voulaient connaître la réaction des drosophiles – adultes et larves – à l’arrivée d’un prédateur mort ou vivant dans leur milieu; un petit morceau de coton séparait les mouches des prédateurs.
« La drosophile est très utile pour l’étude de l’évolution, parce que la saison des amours est si courte chez cette espèce – parfois trois jours seulement – que l’on peut reproduire assez rapidement certains processus de l’évolution », explique Ryan Norris, professeur agrégé à l’Université de Guelph et coauteur de l’étude. « Bref, nous avons pu étudier très rapidement, sur des centaines de générations, l’évolution des insectes en présence ou non de prédateurs. »
Des milliers de générations de petits êtres intrépides
La drosophile adulte qui, n’ayant jamais manqué de nourriture, ne redoutait pas que la timidité et la peur ne finissent par l’affamer s’est montrée craintive en présence du prédateur, et cette crainte a persisté parfois jusqu’à la millième génération post-exposition. Cependant, la jeune drosophile, qui devait se battre pour sa pitance, est rapidement devenue intrépide en présence d’un prédateur, puisque les individus plus compétitifs mangeaient plus, se développaient plus rapidement et devenaient des adultes plus vigoureux.
« Notre étude est l’une des premières à démontrer que la lutte pour la vie, qu’elle vise à trouver de la nourriture ou un compagnon, peut faire évoluer une émotion : l’intrépidité », fait observer Gustavo Betini, coauteur de l’étude et chercheur de l’Université de Guelph. « Si nous comprenions comment évolue l’intrépidité, nous serions mieux outillés pour assurer la conservation des espèces insulaires et réagir aux invasions de prédateurs », poursuit-il.
Comme le révèlent ces deux études, la peur et l’intrépidité peuvent, l’une comme l’autre, contribuer à l’extinction d’une espèce.
L’article « Fear creates an Allee effect: experimental evidence from seasonal populations », par Kyle Elliott et coll., a été publié dans la revue Proceedings of the Royal Society et est accessible à .
L’article « Scared fitless: context-dependent of fear to loss of predators over evolutionary time in Drosophila melanogaster », par Kyle Elliott et coll., a été publié dans la revue FACETS et est accessible à .
Cette étude a été financée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
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Kyle Elliott, Département des sciences des ressources naturelles, Université McGill
kyle.elliott [at] mcgill.ca
Katherine Gombay, Relations avec les médias, Université McGill
katherine.gombay [at] mcgill.ca
Ryan Norris, Département de biologie intégrée, Université de Guelph
rnorris [at] uoguelph.ca
Gustavo Betini, Département de biologie intégrée, Université de Guelph
betinig [at] uoguelph.ca