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Plus de la moitié des cours d’eau mondiaux sont intermittents

Plus de la moitié des rivières du monde cessent de couler au moins un jour par an en moyenne
±Ê³Ü²ú±ô¾±Ã©: 16 June 2021

Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l'Université McGill et d’ révèle qu'entre 51 et 60 % des 64 millions de kilomètres de cours d’eau dans le monde cessent de couler périodiquement, ou sont à sec pendant une partie de l'année. C’est le tout premier effort de quantification empirique et de cartographie de la distribution mondiale des rivières et des ruisseaux intermittents. Ces résultats, publiés aujourd’hui dans , appellent à un changement de paradigme dans la science et la gestion des rivières par la révision de concepts fondamentaux qui supposent traditionnellement un écoulement de l'eau toute l'année dans les rivières et les ruisseaux. La carte des rivières non pérennes résultant de cette étude, la première de ce genre, fournit également des informations de base cruciales pour l'évaluation des changements futurs de l'intermittence du débit des rivières et pour déterminer et surveiller le rôle de ces cours d’eau dans les cycles hydriques et biogéochimiques mondiaux, ainsi que dans le maintien de la diversité biologique.

« Les rivières et les ruisseaux non pérennes sont des écosystèmes d’une grande richesse car ils abritent de nombreuses espèces distinctes, adaptées aux cycles de présence et d'absence d'eau, explique , premier auteur de l'étude et étudiant en doctorat en géographie à la fois à McGill et à l'Institut National de Recherche pour l'Agriculture, l'Alimentation et l'Environnement (INRAE). Ces rivières sont souvent des sources d'eau et de nourriture essentielles pour les populations et elles jouent un rôle important dans le contrôle de la qualité de l'eau. Mais le plus souvent, elles sont mal gérées ou carrément exclues des actions de gestion et des lois de conservation, car elles sont tout simplement oubliées. »

Les rivières et ruisseaux non pérennes présents sur tous les continents

« Compte tenu des changements continus du climat mondial et de l'utilisation des terres, on s'attend à ce qu'une proportion de plus en plus grande du réseau fluvial mondial cesse de couler de façon saisonnière au cours des prochaines décennies, a déclaré Bernhard Lehner, professeur agrégé au département de géographie de l'Université McGill et l'un des coauteurs principaux de l'article. En fait, de nombreux cours d'eau autrefois pérennes, y compris des sections de fleuves emblématiques tels que le Nil, l'Indus et le Colorado, sont devenus intermittents au cours des 50 dernières années en raison du changement climatique, des transitions dans l'utilisation des terres, ou du prélèvement temporaire ou permanent d'eau pour l'usage humain et l'agriculture. »

Les chercheurs ont pu identifier les caractéristiques environnementales les plus importantes pour déterminer si un cours d'eau cesse périodiquement de couler en associant statistiquement des relevés historiques du débit d'eau dans 5 615 endroits du monde avec des informations sur l'hydrologie, le climat, la géologie et la couverture terrestre environnante des cours d'eau surveillés à ces endroits. Ils ont constaté, comme attendu, que les rivières non pérennes sont plus fréquentes dans les zones arides (où l'évaporation est beaucoup plus importante que les précipitations) et que les petits cours d'eau ont généralement un débit plus variable et sont donc plus susceptibles de s'assécher. Mais on trouve également des cours d’eau non pérennes dans les climats tropicaux et même dans l'Arctique, où les rivières gèlent pendant une partie de l'année.

Fait intéressant, l'étude suggère également, sur la base d'estimations préliminaires, que plus de la moitié de la population mondiale vit dans des endroits où le cours d'eau le plus proche n'est pas pérenne. En effet, dans de nombreuses langues, il existe plusieurs mots pour désigner ces types de cours d'eau et leur empreinte sur le paysage, ce qui met en évidence la longue histoire d'interdépendance entre les humains et les systèmes d'eau douce saisonniers.

Une négligence de longue date aux conséquences importantes

Au cours de la dernière décennie, plusieurs efforts ont été déployés pour mettre en évidence les valeurs et la dégradation rapide et continue des cours d'eau non pérennes. Jusqu'à présent, la plupart des sciences de l'eau douce se sont concentrées sur le fonctionnement et la conservation des masses d'eau pérennes. Ce n'est que récemment que les scientifiques ont commencé à prendre conscience des conséquences importantes de l'intermittence du débit dans les rivières et les ruisseaux. « Par conséquent, les méthodes scientifiques de gestion de ces écosystèmes uniques, telles que les outils et les protocoles de surveillance de la santé de ces rivières, sont encore limitées ou absentes, ajoute Mathis Messager. Et cette négligence conduit à un pompage excessif de l'eau, à la pollution et à la surpêche dans de nombreux cas. »

« Il y a également eu plusieurs tentatives récentes visant à exclure les rivières non pérennes de la législation environnementale et des systèmes nationaux de gouvernance de l'eau, notamment aux États-Unis et en France, ajoute , spécialiste des eaux douces à l'INRAE, et coauteur principal de l'article. En cartographiant les rivières et les ruisseaux non pérennes, notre étude pousse à la reconnaissance de leur prévalence et de leur importance écologique par la communauté scientifique. Nous espérons que notre étude déclenchera des efforts pour gérer de manière adéquate ces écosystèmes fluviaux et mettre fin aux tentatives de les exclure des lois de protection. »

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« Global prevalence of non-perennial rivers and streams » par Mathis Messager et al a été publié dans

DOI : 10.1038/s41586-021-03565-5

La recherche a été financée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), une bourse Tomlinson de l'Université McGill, une bourse de doctorat de l'école doctorale de Lyon H2O, et par le biais du projet DRYvER, qui a reçu un financement du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne

À propos d’INRAE :

INRAE, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, est un acteur majeur de la recherche et de l’innovation créé le 1er janvier 2020. Institut de recherche finalisé issu de la fusion entre l’Inra et Irstea, INRAE rassemble une communauté de 12 000 personnes, avec 268 unités de recherche, service et expérimentales implantées dans 18 centres sur toute la France. L’institut se positionne parmi les tout premiers organismes de recherche au monde en sciences agricoles et alimentaires, en sciences du végétal et de l’animal, et en écologie-environnement. Il est le premier organisme de recherche mondial spécialisé sur l’ensemble « agriculture-alimentation-environnement ». INRAE a pour ambition d’être un acteur clé des transitions nécessaires pour répondre aux grands enjeux mondiaux. Face à l’augmentation de la population, au changement climatique, à la raréfaction des ressources et au déclin de la biodiversité, l’institut construit des solutions pour des agricultures multi-performantes, une alimentation de qualité et une gestion durable des ressources et des écosystèmes.


L’Université McGill

Fondée en 1821 à Montréal, au Québec, l’Université McGill figure au premier rang des universités canadiennes offrant des programmes de médecine et de doctorat. Année après année, elle se classe parmi les meilleures universités au Canada et dans le monde. Établissement d’enseignement supérieur renommé partout dans le monde, l’Université McGill exerce ses activités de recherche dans deux campus, 11 facultés et 13 écoles professionnelles; elle compte 300 programmes d’études et au-delà de 40 000 étudiants, dont plus de 10 200 aux cycles supérieurs. Elle accueille des étudiants originaires de plus de 150 pays, ses 12 800 étudiants internationaux représentant 31 % de sa population étudiante. Au-delà de la moitié des étudiants de l’Université McGill ont une langue maternelle autre que l’anglais, et environ 19 % sont francophones.

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